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Dossier comportements - Gilles Vinet

 
Qu'est-ce qu'un enfant adulte ?
Texte original intitulé Resources for Adult Children - Traduits et adaptés par Gilles Vinet

 

Le terme enfant adulte a une double signification : l'adulte est prisionnier de ses peurs et de ses réactions enfantiles, et l'enfant qui a été forcé de devenir un adulte sans passer par les stades naturels et développementaux qui vont faire de lui un adulte sain. 
En 1969, Margaret Cork, une psychothérapeute canadienne, nous a offert la première recherche sur les enfants ayant grandi dans des familles alcooliques dans son livre : The Forgotten Children (Les enfants oubliés). 

À New York en 1977, les membres d'un petit groupe familial Al-Anon ont découvert qu'ils étaient tous des enfants de parents alcooliques. Ils débutèrent le premier meeting "Children of Alcoholics" (Enfants Adultes D'Alcooliques). 

Tard dans les années 70, un thérapeute du New Jersey commença à travailler avec un groupe formé d'adultes qui ont grandi dans des familles alcooliques. Le processus et les aboutissements de cette psychothérapie ont jeté les bases d'un livre publié en 1982 Adult Children of Alcoholics par Janet Geringer-Woititz. Dans son livre, le Dr. Woititz décrit les caractéristiques d'un enfant adulte d'alcoolique. Sa liste a été dressée à partir de ses observations d'un groupe EADA qu'elle animait. Sa liste des caractéristiques et la liste d'assainissement (Laundry), utilisées dans les meetings COA (EADA ) à New York, ont été dissiminés partout au pays pour être modifiés et devenir le texte intitulé Le Problème divulgué en 1984 à la Conférence des Services Mondiaux ACA (CSB/IWSO Business Conference).

Les enfants qui sont sains ne sont pas le résultat d'une enfance "parfaite" mais sont les suites normales d'un système familial qui a des règles raisonnables et stables, qui sont les fondations de la confiance et de réactions adéquates au bris ou non respect de ces règles. Les punitions dans une famille saine n'incluent pas les châtiments corporels, ne laissent pas des cicatrices sur le plan émotionnel et ne sont pas disproportionnées au manquement ou au délit.

Les enfants adultes viennent de foyers où les règles de conduite étaient sujettes aux humeurs de la personne en autorité dans la pièce à un moment donné. Nous pouvons avoir reçu l’ordre du père de faire quelque chose, et ce geste est interdit en même temps par la mère ; nous pouvons être demandé de poser ce geste différemment par un grand parent et ridiculisé par avoir fait ou non ce geste par un oncle ou un ami de la famille. Comme résultat, l’enfant adulte grandit sachant qu’il ne peut rien faire correctement — qu’il y a quelque chose de défectueux chez lui. 

 Dans une famille saine, les parents sont des figures d’autorité remplies d’amour, capables de faire comprendre ce qu’ils désirent et ce qui leur répugnent, expriment leurs besoins et leurs émotions, laissent de la place pour discuter et pour être ouvertement en désaccord et ne pas être parfait — tout ça sans menacer la confiance et l’amour qui sont sousjacents et sont toujours accessibles et constants pour tous les membres de la famille. 

Un parent sain peut faire une erreur et ce n’est pas un événement traumatisant pour les enfants mais bien une démonstration de la liberté et de l’honnêteté qui est présente dans une famille en santé. Les enfants sains apprenent que leurs parents sont des êtres humains et qu’ils ne sont pas parfaits et l’enfant lui-même apprend qu’il n’a pas à être parfait, qu’il a seulement à faire de son mieux. Les enfants apprennent qu’ils peuvent faire des erreurs, qu’ils doivent être en mesure de réparer les torts qu’ils peuvent avoir causés et et ils apprennent aussi de leurs expériences. 

Dans une famille dysfonctionnelle, les parents sont l’autorité dont les paroles et les gestes ne peuvent être remis en question. Devant de flagrantes fausses informations, des gestes qui causent du tort à lui ou qui lèsent quelqu’un d’autre, l’enfant adulte apprend  que ses propres désirs, besoins, sa propre sécurité sont moins importants que le fait de soutenir le système familial. L’indépendance qui est possible dans les familles saines à l’intérieur de certaines limites acceptables, est une menace à l’autorité des parents dysfonctionnels. L’enfant adulte s’habitue à entendre des commentaires comme «Qui est-ce que tu penses que tu es ?» — «Tu n’arriveras pas à grand’chose !» — et «Qu’est-ce qui te fait croire que tu es si bon que ça ?»

Les enfants adultes apprennent qu’ils ne doivent jamais dépasser le niveau de compétence de leurs parents. Ils apprennent que c’est dangereux de devenir un meilleur étudiant, d’avoir un revenu supérieur, d’avoir une famille plus saine ou d’être plus respectés par les autres. Le parent dysfocntionnel prend ces succès comme des menaces — qu’ils ne sont «rien de moins». L’enfant adulte peut ne pas être conscient de cet autosabotage qu’il entretient dans sa propre vie et doute de ses capacités d’accéder à quelque forme de succès que ce soit.

Durant son enfance, l’enfant adulte a appris à se conduire de toutes les façons qui lui permettaient de survivre. Ces comportements de survie peuvent aller du mépris de l’autorité ( l’image romantique du rebelle) à la suppression de leurs propres besoins et à s’occuper des besoins des autres qui continuent à jouer un rôle parental dans leurs vies.
Les enfants apportent avec eux dans leur adolescence et dans leur vie adulte les perceptions primaires qu’ils se sont faits des règles familiales. Bien qu’élevés dans une famille dysfonctionnelle, la base tordue sur laquelle ils ont grandi fonctionne juste assez bien pour laisser croire à l’illusion d’une famille fonctionnelle. 

 Virtuellement, tous les systèmes familiaux dysfonctionnels, cependant, sont engagés dans une grande spirale qui les mènent lentement vers un bas-fond, requérant de plus en plus d’énergies pour défendre les réalités «officielles» de la famille face à des preuves accablantes qui se montrent de plus en plus. 

Quand un enfant qui a grandi dans une famille dysfonctionnelle entre dans la «vraie vie» — écoles et marché du travail — il découvre que son propre système familial n’est pas la même «réalité» que vivent les autres élèves et leurs confrères de travail. Plusieurs enfants adultes deviennent des ermites ou forment des relations rigides, exclusives et toxiques avec d’autres enfants issus de familles tout aussi dysfonctionnelles. Leurs relations vont renforcer leur vision dysfonctionnelle du monde en «trouvant enfin quelqu’un qui les comprend». La rigidité de leurs liens qui est créée et entretenue dans ces relations est accentuée par le manque chez ces enfants adultes d’un sens d’identité personnel — Ils ne savent pas où ils finissent et où les autres commencent. Comme résultat, ils ne peuvent fixer leurs propres limites et commencer à recevoir et à composer avec les opinions, les défauts et les besoins des autres.

Si l’enfant adulte est capable de développer des relations interpersonnelles qui persistent (certains en sont totalement incapables), c’est habituellement avec d’autres enfants issus de familles dysfonctionnelles qui ont sensiblement les mêmes caractéristiques familales en ce qui a trait à la dysfonction familiale. Les enfants adultes peuvent être très lents quand c’est le temps de reconnaître les patterns de problèmes familiaux — ils passent leurs vies à recevoir de leur famille un entraînement rigoureux à oublier ce qui pose problème. — même si ce problème est recréé avec ses amis, dans ses relations matrimoniales et professionnelles. Bien que quelques fois les symptômes extérieurs, visibles sont absents ( la bouteille, les dettes de gambling, la violence, etc.) le comportement est présent assez de bonne heure dans la relation. Quand le comportement dégénère en une pleine dysfonction, l’enfant adulte est souvent le dernier à le reconnaître et se sent trahi au plus haut point («Je ne savais pas qu’il buvait…» — «Mon Dieu, elle est pareille comme ma mère…» À ce moment où il s’éveille, l’enfant adulte peut tomber en dépression et se sentir incompétent de ne pas s’en être aperçu avant — «Qu’est-ce qui ne va pas chez moi ?» — «Pourquoi ne m’en suis-je pas aperçu ?» Le manque d’habiletés nécessaires pour s’aimer soi-même peut laisser l’enfant adulte avec une honte intense envers lui-même et une estime de soi presque ou complètement inexistante.

Types d’Enfants Adultes

La plupart des livres publiés sur le sujet (les enfants adultes) sont d’accord pour définir certains types de personnalité fréquents dans les familles dysfonctionnelles. Certains livres nomment ces traits de caractère par différents noms et nous ne pouvons retrouver tous ces types ici. 
Ces différents types de personnalité sont : 

Le héros familial — un gagnant, habituellement (mais pas toujours) le plus vieux des enfants. Souvent un «workaholique» (ergomane) qui peut identifier les besoins des autres et s’arranger pour qu’ils soient comblés, mais ne peut arriver à comprendre ses propres besoins. C’est souvent un enfant qui utilise ses succès pour se découvrir un sentiment d’appartenance — c’est celui qui va montrer à la famille que tout va bien mais qui est incapable de ressentir aucun bénéfice de ses réussites. Cet enfant adulte se sent comme une fraude, une majestueuse tromperie sur la qualité de sa personne ; de ce fait, il est sujet aux dépressions qu’il cache manifestement aux yeux des autres. 

Le sauveur — pareil au héros familial, mais sans succès très visible. Le sauveur cherche tous ceux et celles qui sont dans le besoin, les admet sous son toit ou leur trouve un emploi tout en leur procurant un soutien et un support pour combler leurs besoins et il est très compréhensif malgré de nombreuses trahisons et perfidies. Le sauveur a une haine envers lui-même très profonde qui le pousse à jouer ce rôle de sauveur, parce qu’il croit qu’une personne qui n’a pas atteint une forme de bas-fond ne voudra rien savoir de lui. Il se sent inadéquat dans cette obssesion du don de soi et il est incapable d’acepter de recevoir de l’aide pour combler ses propres besoins. 

La mascotte— souvent un jeune enfant qui se sert de l’humour ou d’autres comportements loufoques ou distrayants, comme être particulièrement porté à faire des gaffes ou à se retrouver ans des situations de crise ou carrément dans le trouble, afin de décentrer l’attention de la famille des problèmes de la dysfonction familiale. Si le parent est intoxiqué et violent, la mascotte peut se jeter sous les coups de l’abuseur pour «sauver» le reste de la famille ou peut détourner au bon moment l’esprit de tous les membres de la famille de la douleur de leur réalité commune. 

L’ajusteur — celui qui n’est jamais dérangé par ce qui se passe ; il n’y a pas de raison de s’énerver parce que tout le monde doit vivre quelques problèmes familiaux. L’enfant n’est jamais lié à quelque but que ce soit ou à quelque désir qu’il puissee vivre parce qu’il a appris à changer de cap rapidement et sur le vif de la situation présente. 
Il «flotte» au gré des marées sachant que quelque chose ne va pas mais compose avec le chaos ou l’état de crise, souvent assez brillamment, en abandonnant sa propre identité au profit des besoins du moment. 

La «carpette» — cet enfant abusé qui survit en se mettant ventre à terre et qui laisse les autres lui marcher dessus, plutôt que de risquer toute confontation déplaisante ou dangereuse. Cet enfant comprend très bien le besoin que peut avoir une autre personne de le blesser lui-même mais ne peut identifier les émotions qu’éveille son abus dans le présent et les torts qu’il peut avoir subis dans le passé.

Le rebelle — cet enfant réagit à la moindre provocation («acting out»), que ce soit une action quelquefois héroïque pour prévenir tout abus envers un autre membre de la famille (en détournant l’attention de l’abuseur) ou en se protégeant lui-même par sa turbulence ou par sa déliquance. C’est l’enfant qui est le plus visible, le plus évident pour le reste du monde. C’est aussi celui qui peut adopter très jeune ces maladies, soit de l’alcoolisme, de la dépendance ou tout autre comportement toxique et compulsif, comme pour défier le système familial. 

Le bouc émissaire— cet enfant prend tout le blâme et ramasse toute la honte qui émane des actions des autres membres de la famille en étant le plus manifestement dysfonctionnel. Cet enfant sert la famille en étant malade physiquement ou mentalement en permettant aux autres membres de la famille d’ignorer leur propre dysfonction. C’est aussi l’enfant qui tient la famille ensemble — tous les membres s’associent et se serrent les coudes autour de cette nouvelle cause — l’aider. Il apprend à demeurer malade ou en état de crise pour continuer à recevoir le petit peu d’attention disponible dans une famille dysfonctionnelle en permettant à la famille de se centrer sur ce qui n’est pas ok chez lui, ce dont tous les membres se doutent.

L’abuseur— chez cet enfant habituellement victime d’abus physiques, sexuels et/ou émotionnels, s’opère une transition le faisant passer de constante victime à bourreau cherchant désormais à faire souffrir les autres. Souvent l’abuseur est véritablement rempli de remords pour toute la douleur et les torts qu’il impose aux autres mais il va continuer à infliger ces souffrances plutôt que regarder et soigner ses propres blessures.

L’enfant perdu — souvent le plus jeune (ou l’un des plus jeunes) de la famille, ce type de personnalité a appris à rester loin, à éviter le brou-haha, ne pas faire connaître ses besoins et ses désirs et à ne s’attendre à rien. Il fuit ses émotions en niant en avoir. Il adopte n’importe quel comportement qui va lui permettre de rester invisible dans la famille, au travail, à l’école ou dans une relation interpersonnelle. 
 Cet enfant peut s’adopter, peu importe la personnalité de ceux et celles qui l’entourent , une  stratégie pour que ça soit moins menaçant pour lui. 

Le dernier espoir — pareil à l’enfant perdu, cet enfant sur lequel repose le dernier espoir de la famille devient celui qui prend soin de tous les membres de la famille qui sont devenus incapables de continuer à jouer leurs propres rôles. Souvent ce dernier enfant est élevé en se faisant répéter «Tu ne me blesseras jamais comme un tel…» Ces enfants peuvent en effet se dépenser sans compter jusqu’à la mort pour faire ce qui est bien pour les autres membres de la fratrie et de la parenté, peu importe ce qu’il en coûte, au prix même de leurs propres vies. 
 

Chacune de ses personnalités a des besoins spéciaux dans son rétablissement et chaque personne de chacun des types peut se rétablir si elle désire courir le risque de changer et de se soigner. Parce que les personnalités de la famille sont altérées pour ne pas dire mutilées, les traits de caractère des enfants peuvent apparaître également tout aussi brouillés. Un enfant adulte peut même arborer plusieurs types de personnalités en même temps ou il peut jouer un rôle différent à des âges différents dans sa famille ou pouvant varier ou fluctuer selon ses interlocuteurs.

De bonnes nouvelles

En lisant ce document, vous pensez peut-être : est-ce que le rétablissement est possible ? 
La réponse est un «OUI» retentissant. Les services mondiaux d’ACA (Adult Children of Alcoholics — Enfants Adultes d’Alcooliques) ont publié un document sous le titre «La solution» qui offre des partages d’expérience, de force et d’espoir à travers leurs expériences personnelles de rétablissement.

Comme le document «Le problème», il y a plusieurs éditions du document «La solution» qui circulent et qui ont été moidifiés et publiés par des groupes locaux. Tous ces documents sont des tentatives de partager la variété des expériences de rétablissement. 
Le rétablissement de dizaines de milliers d’enfants adultes est une reconnaissance du fait que peu importe combien vous avez été blessés ou vous vous sentez perdus, vous pouvez vous rétablir ! 

Dans ces groupes qui utilisent les Douze Étapes partout au pays, des milliers d’enfants adultes partagent leur rétablissement de la honte, de la culpabilité et du fardeau de leur désespoir.

Plusieurs enfants adultes disent qu’ils ont trouvé ça difficile d’entrer dans un processus de rétablissement parce qu’ils se croyaient blessés et lésés au delà de toute réparation possible.

Certains enfants adultes s’investissent à fond dans une dysfonction simplement parce que la douleur, peu importe l’intensité de cette dernière, est moins menaçante que l’inconnu de vivre en adulte sain. Ils racontent que le point tournant est apparu quand ils ont compris qu’ils n’étaient pas brisés, mais plutôt blessés, meurtris et qu’ils pouvaient se soigner. 
La chose la plus difficile pour plusieurs enfants adultes c’est de réaliser qu’il n’y a pas de réponse simple qui réussisse pour tous et chacun. Vous êtes tous spéciaux.

Vous êtes un enfant qui est né magique et qui a maintenant la chance de redécouvrir cette magie en lui. Comme enfant adulte qui commence à assister à des groupes d’entraide ou de thérapie utilisant les Douze Étapes et ainsi en arriver à se rétablir, vous apprenez à identifier vos propres besoins. Certains de ces besoins peuvent être similaires à ceux exprimés par d’autres membres, mais dans une combinaison qui est unique à vous. Cette combinaison toute spéciale est la clé pour devenir un adulte empli d’amour, en rétablissement et en santé.

L’enfant intérieur

Une des approches de rétablissement les plus fructueuses pour les enfants adultes implique la reconnaissance de l’existence de leur enfant intérieur. Cet enfant était très jeune, perdu et désespéré mais a «gelé» sa croissance pour protéger cette petite graine que chaque enfant a en lui. Les enfants adultes en rétablissement peuvent découvrir et entrer en contact avec cet enfant intérieur et retourner où ce processus de croissance avait été stoppé pour permettre de reprendre et de réaliser la tâche d’enfin grandir pour devenir une adulte en santé.

En voyant les blessures que nous avons subies comme étant celles de notre enfant intérieur, nous créons un modèle de rétablissement basé sur la guérison de cet enfant blessé, perdu, isolé et effrayé, peu importe à quel âge cet enfant a cessé son développement pour ne plus chercher que sa survie. Nous pouvons alors nous servir de ce modèle pour nourrir d’amour et supporter notre enfant intérieur, besoins qu’il est nécessaire de combler pour compléter la tâche de croissance pour qu’il devienne un adulte heureux, fonctionnel et rempli d’amour.

Dans notre dialogue avec notre enfant intérieur, il est important de savoir que cette partie de nous va réagir comme un enfant le fait naturellement. Ça ne veut pas dire nécessairement des accès de colère et de mauvaise humeur mais ça signifie que nous allons revivre des expériences avec des émotions tel qu’un enfant les vit. 

Un enfant ne comprend pas la notion de temps et chaque émotion remplit son univers et ça semble éternel. Si c’est une émotion désagréable, l’enfant croit qu’il va se sentir mal ainsi pour toute la vie, pour toujours. Si c’est agréable, ça devrait durer toute l’éternité.

Le sentiment de peur d’un enfant envahit tout son univers et d’en faire l’expérience comme personne adulte ça peut être bouleversant. Pour comprendre cette peur, rappelons-nous que lorsque l’enfant a arrêté de grandir, les adultes qui vivaient autour de lui étaient beaucoup plus grands que lui. Pour nous, ça serait comme si nous retournions à la maison pour y retrouver un géant de près de six mètres (18 pieds) qui m’attend et nous sommes sans savoir quand il va chercher à nous donner une volée !
L’enfant intérieur est probablement effrayé de l’adulte qu’il est devenu — chaque adulte qu’il connaissait avant de cesser de grandir le blessait ou le trahisait. Nous allons devoir gagner le respect de notre enfant intérieur — ce respect qui est acquis en prenant soin de soi et ce respect commence en fait par le respect de soi. 

L’enfant intérieur a aussi une tâche à accomplir et il doit bien l’exécuter. Il doit faire ce qui est nécessaire pour survivre. Une de ces jobs, c’est de supprimer des souvenirs qui sont trop difficiles à conserver en mémoire ou à composer avec. Quand nous commençons à nous approcher de notre enfant intérieur, nous allons découvrir que nos souvenirs reviennent graduellement. Il y a des moments où nos souvenirs remontent à la surface comme si c’était le déluge. Mais c’est souvent une tactique pour nous inonder par le simple nombre de souvenirs qui nous empêchent de nous pencher sur un seul en particulier. Nous sommes incapables et donc loin d’être parfaits dans la réception de toutes ces données mémorielles, mais lorsque nous sommes en rétablissement nous n’avons plus à être tout le temps parfaits, nous avons la permission d’être imparfaits. Nous faisons de notre mieux, du mieux que nous le pouvons et lentement, apprendre à redevenir un parent pour nous-mêmes.
 

Compulsions et codépendance

À mesure que les enfants adultes s’engagent dans leur processus de rétablissement, ils vont avoir à rencontrer leurs propres problématiques. La plus visible est probablement celle dont la famille était atteinte et le comportement était habituellement assez facile à reproduire parce qu’assez familier.

Nous allons découvrir que nous avons développé des comportements compulsifs à l’image de ceux de l’un ou de nos deux parents. 

 Si nos parents buvaient ou consommaient des drogues pour se geler, nous avons plus de chance de devenir un alcoolique ou un dépendant ou nous pouvons avoir choisi de transférer cette obsession à un autre domaine — la nourriture, le jeu, les tâches ménagères ou s’engager dans des causes perdues, prendre soin des « petits pitous à la queue coupée et aux oreilles arrachées », etc.

Nous allons peut-être découvrir que nous avons des problèmes de codépendance. Nous pouvons découvrir que nous avons «choisi» des amis qui ne nous appellent que lorsqu’ils sont dans le trouble, mais qui ne sont jamais disponibles quand nous sommes nous-mêmes dans le besoin. Nous pouvons nous être entourés de gens qui en sont venus à croire qui devaient attendre de nous un support et un soutien illimités sutout s’ils sont incapables de solliciter ce genre d’aide de qui que ce soit.Nous pouvons être incapables de découvrir la nature de nos propres besoins ou nous sentir comme inadéquat ou incompétent lorsque nous devons assumer des rôles qui nous sont dévolus ou des responsabilités que d’autres nous ont confiées. 

Il y a bien d’autres problèmes qui, même indépendants de ceux de sa famille d’origine, peuvent être rencontrés par l’enfant adulte dans son rétablissement comme :

  • L’alcoolisme
  • La dépendance
  • La codépendance
  • Des abus physiques ou sexuels sur des enfants / Inceste  comme victime ou auteur du crime
  • Outremanger compulsivement, boulimie ou anorexie
  • Le jeu pathologique
  • La violence et l’agressivité compulsive comme victime ou auteur du crime
  • La dépression
  • Le diabète / L’hypoglycémie
  • Le fanatisme religieux (sectes) ou politique (terrorisme)
  • La haute pression artérielle
  • De piètres habitudes de santé
  • La sexualité compulsive

  •  

    C’est important que chacun de ces problèmes soit adressé en rétablissement ou le processus peut être suspendu et une toute nouvelle dépendance peut s’installer et prendre toute la place.

    Et pourquoi pas… une thérapie ?

    Plusieurs conseillers, psychothérapeutes et psychologues se sont avérés de bons agents de changement pour plusieurs enfants adultes dans leur processus de rétablissement. Presque toute la littérature qui traite du sujet des enfants adultes a été écrite par des professionnels de la santé mentale. Trouver le thérapeute compétent et adéquat peut présenter un problème mais ce sont ce genre de problèmes qui sont facilement possibles de solutionner.

    Les enfants adultes apprennent souvent à nier ou simplement à ne pas comprendre leurs propres besoins. Ça leur rend la tâche difficile de reconnaître ou d’admettre qu’ils ont besoin d’aide. Comme ce sont eux qui sont habituellement les sauveurs, ceux et celles qui prennent soin des autres, nous retrouvons la plupart du temps les enfants adultes dans des professions d’aidants — comme les psychiatres, les psychologues, les intervenants et thérapeutes, les enseignants, les policiers, les membres des forces armées, les pompiers et les membres du clergé.

    La confiance est un des points problématiques difficiles pour les enfants adultes.  Faire confiance à un thérapeute qui devrait nous accompagner dans le but d’affronter nos plus grandes peurs et de découvrir que nous devons développer notre humanité, tout cela requiert de la confiance. Ça peut être utile de trouver un professionnel qui a lui-même identifié et a lui-même composé avec succès avec ses problèmes d’enfant adulte. Ce type de thérapeute peut être d’un grand secours à mesure que nous allons progresser dans notre propre rétablissement. 

    Certains thérapeutes ont recréé autour d’eux une famille dysfonctionnelle qui ressemble à leur famille d’origine mais ils ont changé leur description de la situation, à travers un nouveau scénario pour que leur autorité ne soit jamais remise en question. 
    Par exemple, souvent nous entendons dire que si les psychiatres mettent souvent leurs patients sous médication, c’est souvent pour les garder tranquille plutôt qu’écouter ce qu’ils ont à dire vraiment ou ce qui se passe tout autant en eux en réaction. La valeur même limitée d’une telle approche pour un enfant adulte est questionnable.

    Ces lignes directrices n’ont pas été établies pour juger de telle ou telle approche mais plutôt pour trouver le thérapeute qui pourra nous guider vraiment à travers ce processus de rétablissement et comprendre comment nous allons nous sentir.
    Nous n’avons pas besoin de connaître tous les détails de son histoire personnelle mais c’est tout à fait approprié de lui demander où il a suivi sa formation concernant la problématique d’enfant adulte et de pouvoir lui exprimer nos besoins. 

    À mesure que le processus de rétablissement se poursuit, nous pouvons en venir à croire que nous sommes plus que l’ensemble dusfonctionnel et capoté de nos défauts de caractère et de nos déficiences — nous allons commencer à nous percevoir et à nous apprécier comme un adulte en croissance, aimant et aimé.

    Nous ne sommes pas seuls. D’autres ont partagé leurs histoires personnelles, ont ressenti leurs peurs et leurs souffrances et chacun leur tour sont entrés en rétablissement dès qu’ils ont cru leur rétablissement possible. Ils ont pris le risque de croire que quelque chose de bien pouvait se produire dans leurs vies. Ils ont pris cette chance et nous invite à faire les mêmes premiers pas avec les Étapes — assister à des meetings pour trouver le groupe d’entraide ou la fraternité qui nous convient. Ils nous invitent aussi à trouver un thérapeute qui pourra nous aider.

    À mesure que nous progressons en nous rétablissant, nous allons découvrir que c’est plus facile de nous engager à fond dans ce processus de guérison — pour soigner nos blessures et pour grandir, peu importe ce que nous allons trouver en cheminant ainsi ! 

    Les bienfaits du rétablissement nous aident à nous sentir bien. Peu importe les souvenirs qui peuvent surgir, peu importe les émotions avec lesquelles nous devons composer, peu importe quoi que ce soit, notre rétablissement va se poursuivre. 

    Nous sommes tous invités à nous joindre à ces milliers de personnes déjà en rétablissement. 
    Et qui reviennent dans ces groupes d’entraide ….parce que ça marche !
     

    Note de la traduction : Une partie de cet article continue en traitant des ressources et publications de toutes sortes destinées aux enfants adultes, semble passer date et n’est pas utile pour les enfants adultes francophones et québécois. Il est préférable de s’adresser aux groupes familiaux Al-Anon qui ont initié le mouvement et dont certains groupes sont clairement identifiés pour les enfants adultes. 

    Qu'est-ce qu'un enfant adulte ?
    Texte original intitulé Resources for Adult Children, brochure publiée par Onion House, P.O. Box 26899, Phoenix, AZ 85068.
    Texte en anglais original disponible à l’adresse suivante : http://www.intrepidsoftware.com/rec/whatis.html

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