LES CORRESPONDANCES DE LEE
Mimi G

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Objet:   La co-dépendance
De:      Mimi G
Date:    Lun 16 janvier 2006 22:46
À:       lee@quandladrogue.com

Chère Lee,

Je me devais de t'écrire, je suis toujours fidèle à ton site mais il est difficile quelquefois d'écrire ma souffrance. J'avais trouvé sur ton site, le nom de Monsieur Vinet qui m'avait parlé de ce livre lors d'un entretien téléphonique,  j'appelais un peu partout pour chercher de l'aide, j'ai beaucoup aimé ce livre, j'ai pris ce qui m'appartenais et vraiment c est une bonne ressource pour les parents aux prises avec des enfants toxicomanes.

Je t'ai écrit quelquefois par le passé, j'ai un fils de 29 ans toxicomane, en novembre il avait 9 mois de sobriété, la dernière fois que je lui ai
parlé il était toujours intervenant dans une maison de thérapie. 

Même sobre notre relation est difficile et je sais qu'il souffre et toujours il se défoule sur moi, j'ai assisté à un de ses partages, il dit les vraies
choses, comme" je suis un égocentrique", manipulateur, et souvent je me défoule et c'est ma mère qui écope....

Il m'a écrit et m'a dit qu'il voulait garder ses distances et toujours avec quelques méchancetés, lorsqu'il me parle de ses projets, si je ne parle pas il dit tu m'écoutes pas ou tu m'as jamais écouté, si je parle il dit que je n'ai pas raison.... peut importe il me manipule. 
Si j'avais la même maladie que lui il n'agirait pas comme cela, il ose me faire des reproches à propos de mon confort, je remercie cette ange qui veille sur moi pour tenir le coup, il a fait une colère chez-moi alors que je venais de subir une chirurgie majeure, à peine si je marchais, il criait dans l'appart à tue tête, j'ai vécu malgré tout ma convalescence en paix et je viens de reprendre le travail  je ne souffre plus comme avant. Je me suis aperçu durant son séjour à la maison qu'il essayait de reprendre le contrôle de sa vie ce qu'il avait perdu, il partait vivre en coloc, il vivait du stress face à cela, se posait beaucoup de questions à propos de tout? budget? meuble etc... il n'a pas dormi de la nuit donc le matin il était agressif.

Je veux qu'il soit heureux et qu'il vive en santé mais moi aussi je veux être heureuse et vivre en santé.

J'ai décidé que j'allais être bien, j'ai compris dans toute cette souffrance que ce détachement que j'ai fait était nécessaire, il m'arrive de regarder ses photos, tout les gens disent qu'il est beau, je vois son visage lorsqu'il me manipule et mes sentiments sont bizarres...

Je viens lire tes écrits à tous les semaines, c'est ce qui m'a fait le plus grand bien car les ressources sont très rares. 

J'encourage toujours les jeunes à aller en thérapie fermé, même s'il y a rechute, ils grandissent et savent qu'ils peuvent s'en sortir et qu'il y a
de l'espoir et nous les parents il faut souvent s'éloigner de tous ces comportements, on a pas à voir tout cela.

J'ai repris le contrôle de ma vie, est-ce que j'ai assez souffert? mon cheminement? il a quand même prouvé qu'il pouvait s'en sortir, peut-être
cela aussi?  j'ai aussi vu qu'avec ses partages ils donnaient plein d'espoir aux jeunes?

Je voulais sincèrement te remercier de m'avoir lu dans mes moments de désespoir et de m'avoir répondu avec des mots qui m'ont fait le plus grand bien.

Mimi


Objet:   Re: La co-dépendance 
De:   lee@quandladrogue.com 
Date:   Mar 17 janvier 2006 21:48 
À:   Mimi G

Bonsoir,

Étant donné que nous parlons le même langage, je t'avoue que je me sens totalement dans mon élément à échanger avec toi. Je peux respirer à mon aise, je peux laisser ma plume danser sans craindre de te frustrer. Quel plaisir, c'est un plus dans ma vie de mère codépendante.

Tu me donnes tout de même des nouvelles intéressantes. Certes, que j'aurais aimé savoir que son rétablissement vous a rapproché mais les blessures restent béantes, les paroles déchirantes marquent toujours nos pensées et nos souvenirs sont meutris par la noirceur de leur maladie. Et même si le rétablissement est à la table d'honneur, il n'en reste pas moins que l'être intérieur est blessé, trop souvent agressif par son impuissance et qu'il se retrouve devant un champ de ruines.

Quant à moi, au fil du temps, je n'aurais jamais pensé que mes deux filles auraient marié les mêmes maladies. La vie est remplie de mystères et d'inconnu. Certes, que si je pouvais changé les choses, je le ferais mais pour qui? Pour moi. Mes filles marchent dans cet enfer et à quelque part, elles trouvent un certain réconfort dans leur surconsommation. Et je me dois par ce recul de respecter leurs choix et leurs faiblesses.

Quant à toi, tu m'écris que ton fils aide les autres par ses paroles. Ça c'est une excellente nouvelle! Il dit les vraies choses. Je vais dire comme
M. Ronald Toupin (notre premier collaborateur sur ce site - maintenant décédé) «J'aime!». J'aime les gens vrais qui disent la vérité. Ces gens
peuvent nous faire avancer dans nos valeurs et à travers notre croissance personnelle. Il mentionne même dans ses témoignages qu'il vide son sac dans ta court puisque tu écopes.

Cette remarque me dessine qu'il évolue tranquillement et qu'il sait très bien reconnaître une partie de ses fautes. Il a peut-être mal de se regarder devant son miroir de vie. Ce qu'il crie présentement, c'est la façon qu'il a trouvé de te dire «je m'excuse», «pardonne-moi» et tant plus. Je suis convaincue que ton fils t'aime mais il ne sait pas l'exprimer à travers son langage, ses mots. Je reste confiante qu'un jour, vous prendrez le temps de vous dire les vraies choses et que les «je t'aime» mouilleront votre relation mère-fils.

Mais il faut laisser le temps au temps. Il faut panser nos blessures. Il faut reprendre le contrôle de notre moi malade. Toutes ces années de
surconsommation laissent des marques évidentes. Mêmes si elles ne sont pas visibles, elles sont réelles et douloureuses.

Pour comprendre ma plume, il faut marcher sur ce sentier. Et comme tu le dis si bien «il est difficile quelquefois d'écrire ma souffrance». On ne crie pas sur les toits «mon fils, ma fille surconsomme!» Nous les parents marchons la tête remplie d'inquiétudes, de regrets et de culpabilité. La tristesse habille nos quotidiens. Et ça fait mal! Très mal d'être un parent codépendant. Nous ne sommes pas aveugles. On voit très bien les autres parents qui vivent des relations agréables et qui marchent leur vie fiers de leurs progénitures. Ils deviennent grand-parents et poursuivent leur chemin dans la quiétude de l'héritage qui laisseront à leur lignée. Mais nous, où est l'avenir!

Donc, les aimer avec un détachement d'amour, une recette qui goûte bon! 

C'est la seule façon de survivre aux conséquences de leur maladie. Tant de fois, je m'écrase en pensant à toutes ces années perdues,  polluées par tous ces produits qui meublent nos rues. Et là, à ce moment-là, je ressens une agressivité. Surtout quand je pense que nos gouvernements font si peu pour résoudre ou même, pour contrôler ce fléau. Les gros s'enrichissent sur le dos des pauvres, sur le dos des blessés de la vie. Il y a sûrement une raison pour laquelle ce fléau prend plus de place dans notre société. Quelqu'un à quelque part trouve son profit et nous nous retrouvons à genoux devant cette catastrophe humaine!

Et en lisant ta conclusion, je réalise la grandeur de ton cheminement gagné à travers ce périple. Tu dis «J'ai décidé que j'allais être bien. J'ai
compris dans toute cette souffrance que ce détachement que j'ai fait était nécessaire...»

Je ressens une certaine satisfaction à te lire et surtout, de constater la valeur de ta souffrance. Pour arriver à une telle conclusion, il faut avoir
verser son chapelet de larmes, n'est-ce pas! 

Je ne vais plus à l'église mais j'ai ma Foi. Elle est réelle et je crois que quand notre plume écrit des réflexions si fortes c'est qu'à quelque part on mérite d'être heureuse.

Et pour cette raison, je te souhaite pour 2006, une marre de sourires et surtout, de marier ta Sérénité!

Lee qui marche à tes côtés et qui te remercie pour ta correspondance.
 

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